RFI: Une loi contre la "propagande gay"

Reportage diffusé dans Accents d'Europe, le 24/10/2012Encore une atteinte à la liberté d'expression en Ukraine. Début octobre, le Parlement a passé en première lecture une loi visant à interdire ce qu'on appelle « la propagande de l'homosexualité ». Le projet est dénoncé comme un retour en arrière par les défenseurs des droits de l'homme et les Occidentaux, mais il trouve un certain écho dans la société ukrainienne.  Certains se sont abstenus, mais aucun député n'a voté contre. Le 2 octobre, c'est à une écrasante majorité que le Parlement ukrainien  a adopté en première lecture la loi contre « la propagande homosexuelle ». Si elle entre en vigueur, il deviendra impossible de parler d'homosexualité dans un espace public ou dans les médias. Le but, c'est de protéger les enfants d'un contact avec des informations jugées malsaines. Tout contrevenant s'exposerait à des peines allant jusqu'à 5 ans de prison. Un des auteurs de la loi, le député communiste Yevhen Tsarkov, estime qu’il n’avait pas vraiment le choix , au vu de la pression exercée par la communauté gayYehven Tsarkov: Avant c'était la règle dans tous les pays du monde. Les personnes avec une orientation sexuelle différente de la tradition se faisaient discrètes. En URSS, l'homosexualité était même illégale. Initialement, je ne voulais pas revenir à rétablir une sanction pénale, mais ce sont eux qui ont commencé. Cette année, j'ai été désigné comme « l'homophobe N°1 », mais je ne me considère pas comme un homophobe. Mais en Ukraine, il y a une homo-dictature, un diktat des homosexuels. Par exemple, le 1er septembre, dans une des écoles maternelles de Kharkiv, les instituteurs ont donné aux enfants les drapeaux arc-en-ciel, et ont donné des leçons de tolérance envers les gays. Pour nous c'est inacceptable, parce que nous considérons que l'enfant ne peut pas encore décider consciemment de telle ou telle orientation, parce que c'est un enfant. Dans une Ukraine encore patriarcale et conservatrice, l'homosexualité n'a pas bon dos. Un sondage récent a révélé qu'environ 78% des Ukrainiens ont une opinion négative de la communauté homosexuelle. Une opposition de principe utilisée par les partis politiques à l'approche des élections législatives, avec un soutien marqué des différentes Eglises du pays. Yuri Shpirniy est un activiste de l'association chrétienne « L'amour contre l’homosexualité ».Yuriy Shpirniy: Nous avons une position claire : l'homosexualité, ce n'est pas la norme, c'est une maladie. Malheureusement, la situation est telle qu'aujourd'hui, des groupes très sérieux ont intérêt à déformer cette norme et à présenter l’homosexualité comme une simple variante. C'est anti-historique, c'est anti-scientifique, c'est tout simplement contre la réalité. Nous avons maintenant une quantité très petite de personnes qui impose ses valeurs à tout le monde. C'est une situation unique quand même! Pour les défenseurs des droits de la communauté gay , la loi est un dangereux retour en arrière. Elle s'inscrit dans une évolution inquiétante de restriction de la liberté d'expression et de rejet de la différence. Pour Stas Michenko, un des leaders de l'association « Gay Alliance Ukraine », c'est inacceptable. Stas Michenko: En soi, cette loi est ridicule. Je ne parle même pas de conventions européennes, mais elle est même contraire à la Constitution de l'Ukraine. D'un point de vue juridique, la loi a été écrite par des ignares. Le titre de la loi parle de libre accès des enfants à une information sécurisée. Mais il n'y a aucune mention du mot « enfant » dans le texte. La notion de propagande n'est pas définie proprement. Donc tout peut être défini comme de la propagande. Par exemple, j'ai lu une déclaration de Tsarkov, l'un des députés, qui disait que si quelqu'un admet publiquement qu'il est gay, c'est déjà de la propagande. C'est ridicule. Hormis les livres, magasines et musique, des films comme « Brockback Mountain » qui raconte l’histoire de deux cow boys amoureux  ou du dessin animé « Bob l'éponge », dont les personnages principaux sont soupçonnés de relations tendancieuses, pourraient être interdits de diffusion en Ukraine. Une chape de plomb pourrait s'installer sur le pays, avec des conséquences dramatiques, comme l'explique Zoryan Kis, activiste de la communauté gay. Zoryan Kis: De fait, la loi ne protège absolument pas les enfants. Mais si elle est adoptée, elle va mener à une augmentation des suicides, à plus d'ignorance, à une recrudescence du Sida. Les jeunes ne seront plus à même d'accéder aux informations concernant le Sida et concernant les comportements sexuels à risque qui favorisent les maladies sexuellement transmissibles. Pour l'instant, on peut encore parler de tout et même d'homosexualité en Ukraine. Peut-être que les élections législatives de la fin octobre décideront si une telle liberté est encore acceptable, mais rien n'est moins sûr.  Ecouter le reportage ici

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