LLB: Comme un parfum de Révolution Orange
Article publié dans La Libre Belgique, le 25/11/2013"On n’avait pas vu ça depuis la Révolution orange. Regardez, j’ai ressorti l’écharpe que je portais à cette époque-là !" Pour Olga, 25 ans, étudiante à Kiev, c’est un jour historique, alors qu’environ 100 000 personnes se sont réunies dans le centre de la capitale pour protester contre la décision du président Victor Ianoukovitch de refuser de signer un accord d’association avec l’Union européenne, malgré ses assurances répétées. Le régime, de plus en plus autoritaire, a aussi rejeté toute possibilité de libérer Ioulia Timochenko, l’ennemie jurée du Président. "On croyait que nous serions la génération de l’intégration européenne", confie Nataliya, jeune designer. "L’Ukraine est indéniablement un pays européen. Mais à cause de la trahison du gouvernement, toute perspective de rapprochement avec l’Europe est bloquée pour au moins cinq, dix ans !"Les forces de police ont visiblement tenté d’empêcher à des centaines de personnes venues des provinces d’entrer dans la capitale. L’avion d’une des icônes de l’opposition, le boxeur Vitali Klitschko, en provenance d’Allemagne, n’a ainsi pas pu atterrir à temps pour la manifestation. Ce qui rend le succès de la manifestation, et son déroulement paisible, d’autant plus inédit. Seules quelques échauffourées ont éclaté aux abords du cabinet des ministres. Leaders politiques et personnalités de la société civile ont réclamé une session extraordinaire du Parlement pour décider, à la dernière minute, de la signature de l’Accord lors d’un sommet européen crucial à Vilnius, le 28-29 novembre.Une "étrange coïncidence"A quelques centaines de mètres de la manifestation principale, le Parti des Régions, la majorité présidentielle, avait organisé son propre meeting. Moins de 10 000 personnes étaient venues légitimer la décision du gouvernement, que le Premier ministre Mykola Azarov décrit comme "tactique". "Le pays n’est pas prêt à faire face à la concurrence des produits européens", explique Vitaliy, jeune manifestant. "En plus, l’UE ne promettait pas suffisamment d’argent pour nous assister, contrairement aux pays d’Europe centrale. Au moins, avec les marchés russes, on sait à quoi s’attendre."De sa prison, Ioulia Timochenko a remarqué, dans une lettre ouverte, une "étrange coïncidence" avec les événements de 2004. "Nous n’avons pas le droit d’échouer cette fois-ci", écrit-elle. Mais, manifestation réussie ou non, il semble bien que la balle soit dans le camp du président Ianoukovitch.