RFI: Journée de pause dans la mobilisation à Chisinau
Intervention dans le journal de 8h, sur RFI, le 23/01/2016A Chisinau, la crise politique ne perd pas en intensité depuis l’investiture, mercredi 20 janvier, d’un gouvernement impopulaire et corrompu. Le vote avait déclenché des émeutes aux abords du Parlement et des manifestations de masse dans le centre de la capitale. Le weekend s’annonce comme un tournant pour l’avenir du mouvement de protestation. Quelle est la situation sur place? Je me trouve dans le quartier gouvernemental, entre le Cabinet des ministres et le Parlement, où les plus grosses manifestations se sont tenues encore hier, mais ce samedi, rien n’est organisé. On ne trouve que quelques policiers autour de tentes d’un mouvement anti-corruption, vaguement pro-européen, qui sont disposées sur la place principale depuis l’automne. On est loin des échauffourées du milieu de la semaine, quand des manifestants avaient pénétré dans le Parlement et humilié publiquement des députés accusés de corruption. Aujourd’hui, les organisateurs du mouvement de protestation marquent une pause, et appellent à une manifestation monstre demain dimanche. Ils veulent par là prendre le temps de mobiliser des participants dans les régions de la Moldavie. Mais il s’agit aussi de définir une ligne commune pour un mouvement qui est très diverse, composé de socialistes, d’oligarques post-communistes et de représentants de la société civile. Personne ici ne semble savoir à quoi ce mouvement peut aboutir.Quelles sont les demandes des protestataires? Ils réclament avant tout des élections anticipées, une réforme constitutionnelle, et la fin du système de corruption généralisée qui gangrène la Moldavie. L’investiture du nouveau gouvernement, le troisième en moins d’un an, consacre la domination sans partage sur le pays d’un oligarque sulfureux, Vlad Plahotniuc. Il entretient un système de clientélisme et de morosité économique dramatique. Le nouveau Premier ministre, Pavel Filip, est perçu comme son homme de lige. L’intégration européenne du pays que la coalition au pouvoir assure défendre, ne serait en fait qu’une couverture de facade. Les protestataires anti-gouvernementaux veulent en finir avec ce système, mais les principaux représentants de l’opposition, notamment le très énigmatique Renato Usatii, sont eux aussi des oligarques, plus ou moins proches de la Russie. Rien ne dit qu’ils en finiraient avec l’oligarchie si leurs demandes étaient respectées, ce qui nuit évidemment à leur capacité de mobilisation parmi la société moldave - et à leurs chances d'obtenir des résultats.