RFI: Nouveautés gazières en Ukraine
Séquence dans l'émission "Bonjour l'Europe", diffusée le 06/11/2013
Les projets de gaz de schiste, c'est assez bloqué partout en Europe. Mais en Ukraine, on y va plein tube. Hier, 5 novembre, le gouvernement a signé un accord majeur avec la compagnie américaine Chevron, pour commencer l'exploration d'un gisement géant dans l'ouest du pays. L'Ukraine, qu'on connaît pour ses guerres du gaz avec la Russie, pourrait vivre une révolution énergétique sans précédent.
C'est si important que ça, le gaz de schiste en Ukraine ?
Oui, apparemment oui. On parle d'estimations allant jusqu'à 3.600 milliards de mètres cube de gaz de schiste, soit les troisièmes réserves d'Europe, derrière la Pologne et la France. Comme vous l'avez dit, Chevron a signé hier un accord de partage de production pour le gisement d'Oleska, dans l'ouest du pays. C'est le deuxième accord du type, puisque la compagnie anglo-néérlandaise Shell est en charge, depuis janvier, d'un gisement géant à l'est du pays.
Il faut encore que les explorations confirment les espoirs des investisseurs. Mais hier, le président ukrainien Victor Ianoukovitch a promis une indépendance énergétique de son pays d'ici à 2020, aussi grâce à d'autres projets de diversification des approvisionnements énergétiques. Et il a même évoqué la possibilité que l'Ukraine devienne exportatrice de gaz ! Sans aller jusque là, les investissements de Shell et de Chevron pourraient atteindre 7 milliards d'euros chacun, et donc ils devraient avoir un impact certain sur l'économie du pays.
On parlait de la même révolution en Pologne. Et finalement les explorations se sont avérées décevantes. Quand est-ce qu'on va en savoir plus sur ce potentiel ukrainien ?
Difficile à dire. Vous savez, le gaz de schiste, ça pose beaucoup d'inquiétudes environnementales, et on peut facilement imaginer que les explorations soient retardées.
En tout cas, au contraire des autres pays européens, on peut être assez sûr que le gouvernement ukrainien va mener le projet jusqu'au bout. Produire du gaz de schiste, ça pourrait être trois fois moins cher qu'acheter du gaz naturel à la Russie, sachant que le prix du gaz russe est démesuré aujourd'hui. Donc rien que ça justifie de mener les explorations à terme. Sans compter que le gaz de schiste renforce la position de l'Ukraine dans les négociations avec le voisin russe.
Oui, vous parlez de négociation, mais on parle aussi d'une possible « guerre du gaz » pour l'hiver qui commence ?
C'est une possibilité. Vous savez que la Russie désapprouve la signature prochaine d'un accord d'association entre l'Ukraine et l'Union européenne dans quelques semaines. Et elle le fait savoir, entre autres à travers le gaz. Il y a une semaine, elle a présenté une note d'environ 654 millions d'euros pour des factures de gaz impayées. L'Ukraine a annoncé avoir commencé à rembourser, mais à dire vrai, les coffres de l'Etat sont vides. Donc si on additionne facture énergétique + finances + hiver qui approche + géopolitique, on ne peut pas exclure de nouvelles tensions dans les mois qui viennent. Et bon, ce n'est pas pour tout de suite, mais vous pouvez vous imaginez la différence que le gaz de schiste viendrait faire dans cette équation.