Le Monde Diplomatique: L'Ukraine se dérobe à l'orbite européenne
Article publié dans Le Monde Diplomatique, édition de décembre 2013Fin novembre, à quelques jours de la signature d’un accord d’association avec l’Union européenne, Kiev a soudainement rompu les négociations, accédant ainsi à la demande pressante de Moscou. Coincée entre deux puissances qui voient en elle tantôt un grand marché, tantôt un pion géopolitique, l’Ukraine, sous la conduite de son gouvernement autoritaire, zigzague sur une voie étroite.« Nous voulons notre intégration européenne ! L’Ukraine, c’est l’Europe ! » : au soir du 21 novembre, les esprits s’échauffent sur Maidan Nezalezhnosti, la place de l’Indépendance de la capitale ukrainienne, Kiev. Plus d’un millier de manifestants ont résolu d’y passer la nuit, dans un élan apparemment spontané que certains s’empressent de qualifier de « second Maidan ». Il y a neuf ans, le 22 novembre 2004, c’est ici que s’étaient montées les premières tentes du mouvement de protestation civique qui allait devenir la « révolution orange ». Comme alors, le président Viktor Ianoukovitch est la bête noire des manifestants. Mais cette fois-ci, il ne s’agit pas d’élections truquées. « Le gouvernement a décidé d’abandonner tous les préparatifs en vue de la signature de l’accord d’association avec l’Union européenne, qui devait avoir lieu à Vilnius dans quelques jours », explique Andriy, 21 ans, étudiant à l’université Taras-Chevtchenko de Kiev. « Et à la place, il a demandé à ses ministres d’intensifier la collaboration avec les pays de la Communauté des Etats indépendants, héritiers de l’URSS ! », s’emporte-t-il.C’est dans le cadre du partenariat oriental que l’Ukraine avait négocié avec l’Union européenne cet accord d’association. Lancée en 2009, l’initiative vise à encourager le rapprochement de six républiques postsoviétiques avec l’Union européenne, notamment à travers la conclusion d’accords d’association ambitieux, aux répercussions tant politiques qu’institutionnelles et économiques. Parmi ces six pays, l’Azerbaïdjan, l’Arménie et la Biélorussie ne sont guère avancés dans les négociations. En revanche, la Géorgie et la Moldavie, après avoir fait de l’intégration européenne une priorité de longue date, sont en position de parapher leurs accords respectifs.
Menaces du Kremlin
Après avoir franchi cette première étape en mars 2012, l’Ukraine s’apprêtait à signer un document définitif lors du sommet de Vilnius des 28 et 29 novembre. Elle était même le poids lourd du partenariat. Avec près de quarante-six millions (...)Lire le reste de l'article ici (espace abonnés)