RFI: Un ministère de l'Information ukrainien controversé

reportage diffusé sur Radio France Internationale, le 21/12/2014L’Ukraine, après la révolution de l’EuroMaïdan et malgré un état de guerre non-déclarée avec la Russie, s’est dotée d’un nouveau président, Parlement, gouvernement, et entame une série de réformes structurelles. Mais tous ces changements n’iraient pas dans le sens du progrès ; certains dénoncent une corruption qui est loin d’être maîtrisée, ou encore des atteintes à la liberté d’expression. En ligne de mire, la création d’un ministère de l’Information, très décrié.Iouriy Stets, député (BPP), en charge du ministre de l'information. S’agit-il d’informer, de contrôler l’information, de censurer ou bien de faire de la propagande d’Etat? Les prérogatives du nouveau ministère de l’information ukrainien sont encore floues. Dans les couloirs du Parlement, même le nouveau ministre, Iouriy Stets, par ailleurs un proche du Président Petro Porochenko, passe son temps à justifier l’existence même de son ministère.Ministre Stets: Nous avons beaucoup d’institutions, mais peu sont en charge d’une politique de l’information, tout simplement car nous n’avons pas de stratégie définie sur cette thématique. Notre ministère a pour tâche justement de définir une stratégie publique. Notre concept est basé sur trois points: améliorer les communications en interne, maîtriser la guerre de l’information qui est en train de se jouer avec la Russie, et protéger nos systèmes de cyber-attaques venues d’autres pays.Mais pour beaucoup, la naissance de ce ministère est une mauvaise nouvelle. Il a été créé sans dialogue préalable. Il va coûter cher à un Etat déjà en crise économique. Et surtout, il est potentiellement un nouveau ministère de la vérité, tel que décrit dans le roman 1984 de George Orwell. Mais pour l’instant, les réactions sont modérées, car la communauté de journalistes est divisée sur la question, comme l’explique Oksana Romaniouk, directrice de l’Institut de l’Information de Masse à Kiev.Oksana Romaniouk: Si on regarde la scène des médias en Ukraine, on voit que la plupart des journalistes adhèrent de plus en plus aux normes du journalisme moderne. Ils se sentent personnellement responsables de produire une information équilibrée. A l'inverse environ 30% des professionnels parlent "d’une mission du journalisme", une mission pour contrer Vladimir Poutine. L’idée d'un ministère de l'information a donc reçu un accueil parfois favorable dans le milieu journalistique.Tetiana Kotyuzhynska est représentante de l’union des journalistes d’Ukraine. Selon elle, ce ministère est un symptôme d’un mal plus profond. Le nouvel exécutif a déjà entrepris des contrôles arbitraires de quelques médias.Tetiana Kotyuzhynska: Oui, c’est déjà de la censure, c’est ce que l’on appelle des pressions légales. Si les nouvelles produites par tel ou tel média plaisent ou ne plaise pas à l’exécutif, cela ne devrait pas avoir l'importance.  ca ne devrait pas avoir de conséquence en termes de contrôle des médias. Le Président Porochenko détient la chaine Kanal 5, il faudrait aussi aller voir qui finance cette télévision. On ne doit pas seulement contrôler la radio Vesti, qui est aux mains d'un proche de POutine. Il faut tout vérifier.Tetiana Kotyunzhynska insiste: la liberté d’expression est encore garantie en Ukraine, et la situation est bien plus enviable que dans d’autres pays de la région. Mais quelque soit l’évolution de ce ministère de l’information, sa simple création constitue indéniablement une erreur de communication.Ecouter le reportage ici

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