RFI: Une vice-ministre, un groupe de travail et des fêtes nationales musulmanes: les cadeaux de Zelenskyy aux Tatars de Crimée

Papier diffusé dans les journaux de la soirée sur RFI, le 19/05/2020

Le 18 mai 1944, Staline ordonnait à l’arrestation en masse de plus de 200.000 Tatars de Crimée, une population indigène, de confession musulmane, vivant sur la péninsule. Ils ont été exilés en Asie Centrale. La plupart n’ont pas pu revenir chez eux avant la chute de l’URSS et l’indépendance de l’Ukraine, en 1991. Hier, à l’occasion des commémorations officielles, 76 ans après la déportation, le président ukrainien Volodymyr Zelenskyy a fait une série d’annonces pour cette minorité nationale, encore une fois malmenée par l’histoire depuis l’annexion de la Crimée par la Russie. Depuis Lviv, Sébastien Gobert

6 ans après la perte de la Crimée, Volodymyr Zelenskyy a voulu réaffirmer que Kiev n’abandonne pas ses revendications sur la péninsule. Le chef de l’Etat fait des Tatars de Crimée le fer de lance de ses efforts diplomatiques. Les bâtiments du Bureau du Président abritaient une exposition sur les crimes de la Russie à l’encontre des Tatars. Devant quelques-uns des dirigeants de la communauté, Volodymyr Zelenskyy a créé un nouveau groupe de travail pour intensifier les négociations de haut niveau. Il a nommé Emine Dzhaparova, première femme tatare de Crimée à devenir première vice-ministre des affaires étrangères. Il a promis la construction de 500 logements dans le sud de l’Ukraine pour héberger les Tatars exilés de leur terre natale, et annoncé le développement de centres communautaires.

Il a aussi fait aussi de deux fêtes musulmanes, Eid al-Fitr et l’Eid al-Kebir des fêtes nationales. Le symbole est fort dans ce pays à prédominance chrétienne. Volodymyr Zelenskyy est lui-même de descendance juive, mais il ne consacre aucun jour férié à la communauté hébraïque. Il n’a pas non plus fourni d’explications sur le financement de ces deux nouveaux jours fériés. L’Ukraine compte désormais 13 fêtes nationales.

Les annonces s’inscrivent dans le cadre des efforts de Volodymyr Zekenskyy d’en finir avec la guerre contre la Russie qui dure depuis 2014. Les combats meurtriers font toujours rage dans l’est de l’Ukraine. Ces gestes politiques en faveur des Tatars de Crimée ne sont néanmoins pas les premiers depuis six ans. Ils visent avant tout à s’assurer la loyauté de cette minorité divisée: si quelques milliers de Tatars ont été contraints de vivre en territoire contrôlé par l’Ukraine après l’annexion, la majorité des 250.000 membres de la communauté sont encore en Crimée, malgré des conditions difficiles. Ces annonces de Kiev trahissent avant tout l’impuissance de Volodymyr Zelenskyy à régler la question de la péninsule. Face à l’intransigeance du Kremlin, les Tatars aujourd’hui déplacés en Ukraine ont de moins en moins d’espoir de voir s’achever ce nouvel exil forcé. Ce 18 mai, les photos officielles montraient ainsi le vieillissant Moustafa Djemilev, survivant de la déportation soviétique, accueillant le discours présidentiel avec sa bienveillance habituelle, mais sans cacher ses regards de sourde résignation.

Previous
Previous

Mediapart: Que faire d'une statue? Le cas Lénine

Next
Next

RFI: Des dizaines de bébés issus de GPA bloqués en Ukraine