Le Monde Diplo: Vaine réforme policière à Kiev

Article publié dans Le Monde Diplomatique, édition du mois de juin 2018.

Présentée comme une réponse aux aspirations des manifestants de 2014, la réforme de la police ukrainienne s’est focalisée sur la corruption des agents de terrain, laissant intacte l’instrumentalisation de l’État par des clans politiques.

Le 31 octobre 2017, à Kiev, M. Oleksandr Avakov, 29 ans, était arrêté par les enquêteurs du Bureau national anticorruption d’Ukraine (NABU). Il était soupçonné de complicité dans une affaire de fraude liée à la livraison de sacs à dos aux forces armées et portant sur un montant d’environ 450 000 euros. L’opération était inédite : le jeune homme n’est autre que le fils unique de M. Arsen Avakov, le puissant ministre de l’intérieur. Dans les minutes qui suivirent l’intervention, des unités de la police et de la garde nationale furent dépêchées pour empêcher les perquisitions et pour gêner le travail des enquêteurs du NABU — un organisme qui, né en avril 2015 d’une campagne anticorruption menée par des organisations non gouvernementales (ONG) et par les Occidentaux, est considéré comme l’institution la plus indépendante dans son secteur. Les entraves à cette enquête ont prouvé de façon flagrante que, quatre ans après le renversement du président Viktor Ianoukovitch, « le pouvoir politique se sert encore de nos forces de l’ordre comme d’un bras armé pour défendre ses intérêts », déplorait le député Moustafa Naïiem, instigateur des premières manifestations, en novembre 2013.

Quelques jours plus tard, un tribunal relâchait M. Avakov sans exiger de caution. Puis, le 7 novembre, son père survivait sans frémir à un vote de défiance à la Rada, le Parlement ukrainien. Critiqué pour son échec à réformer la police nationale — pourtant l’une des priorités du programme postrévolutionnaire —, il assurait n’avoir « aucune raison de quitter son poste ». Depuis sa nomination, en février 2014, cet homme d’affaires à la réputation sulfureuse, actif de longue date en politique, s’est imposé comme le second personnage le plus important de l’État, après le président Petro Porochenko, lui-même milliardaire, arrivé au pouvoir au lendemain des manifestations.

Très évasif au sujet des policiers qui ont volé au secours de son fils, M. Avakov aime à se donner une image de réformateur éclairé. « Aujourd’hui, nous avons réalisé (…)

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