RFI: Un négociateur d’échanges de prisonniers arrêté et accusé d’avoir voulu assassiner Porochenko
Papier diffusé dans les papiers de la matinale, sur RFI, le 10/03/2018
En Ukraine, l’arrestation d’un acteur important de la guerre dans l’est du pays fait grand bruit. Volodymyr ROUBAN a agi en tant que négociateur depuis 2014 dans l’échange de centaines de prisonniers entre l’Ukraine et les territoires séparatistes. Il a été arrêté, transportant un arsenal d’armes dans un fourgon. Il est accusé d’avoir voulu assassiner le président Petro Porochenko. Depuis Avdiivka, Sébastien Gobert
“Nous parlons de la plus grosse menace terroriste sur l’Ukraine depuis l’indépendance en 1991”. Selon le chef des services sécurité (SBU) Vasyl Hrytsak, Volodymyr Rouban comptait prendre d’assaut le quartier gouvernemental à Kiev, au mortier et au lance-roquettes, assassiner le Président, son équipe, et plusieurs milliers de personnes, afin de déstabiliser l’Etat et permettre aux forces pro-russes et russes d’avancer à l’est du pays. Le chef de la République auto-proclamée de Donetsk, Alexander Zakharchenko, soutenait l’opération, de même que Viktor Medvetchouk, un intime de Vladimir Poutine, de même négociateur dans l’échange de prisonniers. L’accusation est grave. Mais pour de nombreux commentateurs en Ukraine, elle ne tient pas la route.
Volodymyr Rouban est connu depuis 2014 comme une personnalité controversée. Dans sa médiation active dans l’échange de plus de 700 prisonniers, il a entretenu des réseaux informels, et a eu recours à un certain nombre de méthodes contestables. La fin justifie les moyens, se défendait-il lors d’un entretien en juillet 2014 à “Nouvelles de l’Est”. Potentiellement lié à des adversaires du Président, Volodymyr Rouban est tombé en disgrâce début 2017. Il s’est distingué par une critique acerbe de la politique de Petro Porochenko. Mais peu croient qu’il ait pu être à même d’organiser un massacre dans la capitale. Lui considère avoir été piégé. Ce 9 mars, un juge lui a demandé s’il avait réellement comploter pour assassiner Petro Porochenko. “Non”, a-t-il répondu. “Mais j’y pense désormais”. Son arrestation induit sans doute qu’il a perdu sa protection politique. Elle est aussi perçue comme un signe de la volonté du pouvoir de faire taire ses critiques, avant l’élection présidentielle de 2019.
Les théories sont nombreuses, dans un environnement politique très polarisé. Toujours est-il qu’il reste des dizaines de prisonniers de part et d’autres, dans l’attente d’une libération éventuelle. L’arrestation d’un des principaux négociateurs, connaisseur du terrain, pourrait compliquer des négociations déjà longues et difficiles.