La Libre Belgique: Porte de sortie pour Ioulia Timochenko. Et pour l’Ukraine ?

Article publié dans La Libre Belgique, le 08/10/2013

Etablir un camp de concentration au centre de l’Europe est devenu de plus en plus difficile pour Ianoukovitch, il se voit forcé de battre en retraite." Pour l’ancienne Première ministre ukrainienne Ioulia Timochenko, son transfert probable vers un hôpital en Allemagne marquerait une défaite fatale pour son ennemi juré, le président Viktor Ianoukovitch, accusé d’une dérive autoritaire depuis son arrivée au pouvoir en 2010.2011-06-24T093605Z_136795006_GM1E76O1D2A01_RTRMADP_3_UKRAINE-TYMOSHENKO_0L’ancienne égérie de la révolution orange de 2004, qui a été condamnée à sept ans de prison au terme d’un procès dénoncé comme politique, souffre d’une santé très fragile depuis son incarcération en 2011. L’amélioration de ses conditions de détention, voire sa libération, sont parmi les premières conditions posées par l’Union européenne (UE) pour assurer la signature d’un accord d’association ambitieux avec l’Ukraine à Vilnius, fin novembre. Après des semaines de tergiversations, Ioulia Timochenko a déclaré, vendredi 4 octobre, qu’elle "accepte officiellement l’offre" faite par les médiateurs du Parlement européen Pat Cox et Aleksander Kwasniewski d’un transfert vers l’Allemagne. Tout en répétant avec insistance qu’il ne "s’agira jamais d’un asile politique".Viktor Ianoukovitch n’a pas fait de commentaire sur cette déclaration. Si la décision d’un transfert est prise, elle devrait intervenir avant le 15 octobre, jour où les conclusions de la mission Cox-Kwasniewski seront rendues publiques."La balle est dans le camp de Viktor Ianoukovitch", analyse Ihor Shevliakov, expert à l’Institut de politique publique à Kiev. "Mais le cas Timochenko est juste un des problèmes qu’il faut régler. On sait que l’UE demande une réforme du code électoral, du système judiciaire et la fin de la justice sélective." Ces derniers se sont multipliés ces dernières années, touchant de nombreux représentants de l’ancien gouvernement "orange". Le gouvernement ukrainien a récemment donné un certain nombre de gages de bonne conduite en la matière. Le vice-procureur général, Rinat Kuzmin, accusé par les Occidentaux d’orchestrer de véritables "persécutions politiques", a ainsi été "muté" récemment."Il semble que le gouvernement soit déterminé à signer", analyse Tetiana Mazur, directrice du bureau ukrainien d’Amnesty International. "Mais cela ne réglera pas les problèmes du système judiciaire que rencontrent les citoyens au jour le jour." Dans un pays gangrené par une corruption rampante, les cas d’abus de pouvoir et de violences policières sont généralisés. "Les policiers ne sont pas tenus responsables de leurs actions, et agissent en toute impunité", continue Tetiana Mazur. Elle réclame depuis des années des réformes en profondeur. En juillet, le viol d’une jeune femme par trois hommes avait servi de symptôme révélateur. Deux des agresseurs étaient des policiers, et ils ont été ostensiblement protégés par leur hiérarchie, ce qui avait provoqué des émeutes. Le simple transfert de Ioulia Timochenko vers l’Allemagne ne servira pas à éviter ce type de sélectivité de la justice.
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