Le Monde Diplomatique: Ukraine, jeux de miroirs pour héros troubles

Article co-rédigé avec Laurent Geslin, publié dans l'édition de décembre de Le Monde Diplomatique.Cet article s'inscrit dans le cadre d'un dossier sur les enjeux de mémoire en Europe centrale et orientale, co-réalisé avec Jean-Arnault Dérens, Laurent Geslin et Corentin Léotard.screen-shot-2016-12-01-at-12-31-11 Début juillet 2016, le conseil municipal de Kiev décidait de rebaptiser l’avenue de Moscou « avenue Stepan-Bandera », du nom de ce nationaliste ukrainien très controversé (1909-1959). « Héros » de la lutte contre le pouvoir soviétique, il fut un temps prisonnier des nazis, mais aussi leur allié en juin 1941, puis fin 1944. Promulgué dans le cadre des « lois de décommunisation » instaurées en mai 2015, ce changement de nom vise à mettre à distance l’héritage de l’Union soviétique autant que l’ombre menaçante du Kremlin. Il rappelle quelques mauvais souvenirs en Pologne, de l’autre côté de la frontière.Le 22 juillet, la Diète polonaise votait à son tour — à une écrasante majorité — une loi qualifiant les massacres de Volhynie, en 1943, de « nettoyages ethniques » et de « génocide ». Durant la seconde guerre mondiale, entre quarante mille et cent mille Polonais ont péri dans cette région aujourd’hui située dans le nord-ouest de l’Ukraine, « brutalement assassinés par des nationalistes ukrainiens », selon l’Assemblée polonaise. Les responsables de ces massacres n’étaient autres que les combattants de l’Armée insurrectionnelle ukrainienne (UPA), fondée par Stepan Bandera. L’UPA est aujourd’hui célébrée en Ukraine pour son combat en faveur de l’indépendance nationale. Elle s’était néanmoins rendue coupable de massacres de Juifs et de Polonais et s’était engagée un temps dans la collaboration avec l’Allemagne nazie.Malgré des intérêts stratégiques convergents entre Kiev et Varsovie face au puissant voisin russe, la concordance de ces votes marque la « fin de la lune de miel ukraino-polonaise », selon l’historien Vasyl Rasevitch, enseignant à l’Université catholique de Lviv (ouest de l’Ukraine). De fait, les contentieux entre les deux pays ne sont pas nouveaux, mais ces récentes initiatives législatives consacrent l’incapacité à établir une vision commune du passé. « Il convient de laisser l’histoire aux historiens et d’empêcher les responsables politiques d’imposer leurs interprétations (...)Lire le reste de l'article ici (Accès abonnés)

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