La fin de l’arme énergétique russe
Hier, 8 février, les Etats baltes se sont déconnectés du réseau de transmission d’électricité qui les reliait à la Russie, au Bélarus et à l’enclave de Kaliningrad.
Ce n’est pas exactement la région de la mer noire
mais c’est un des éléments qui démontre l’affaiblissement progressif de l’emprise énergétique de la Russie sur le continent européen
Bonjour à tous, c’est Sébastien, bienvenue dans cette vidéo où je vous propose un petit tour d’horizon pour expliquer ce déclin de l’arme énergétique russe
le secteur énergétique russe va survivre, même s’il a des difficultés
mais en tout cas ce que ça veut dire c’est que l’Europe est de plus en plus découplée des approvisionnements énergétiques
et que cela renforce mathématiquement sa position politique par rapport à Moscou.
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donc pour ce tour d’horizon, je mentionne la déconnexion des Etats baltes,
et les questions qui sont liées au transit par l’Ukraine, à la fois du gaz et du pétrole
et je vais terminer par la Transnistrie, parce que demain 10 février il y a une deadline importante
Ce 8 février, Estonie, Lettonie et Lituanie se sont déconnectés en bloc du réseau de transmission d'électricité qui les reliait à la Russie, au Bélarus et à l'enclave de Kaliningrad.
C'est le "Baltic Synchro", qui était prévu pour la fin 2025 mais qui a été avancé de 11 en raison de l'invasion de l'Ukraine.
Désormais, ce sont Tallinn, Riga et Vilnius qui gèrent leurs approvisionnements en éléctricité, et non plus Moscou.
Aussi: la déconnection balte isole encore un peu plus Kaliningrad comme on peut le voir sur cette carte
Aujourd’hui 9 février les Etats baltes se connecteront au UCTE (Union for the Co-ordination of Transmission of Electricity, aussi connu comme le réseau continental.
donc qu’est-ce que ça veut dire, ça veut dire
on voit sur cette carte que la Moldavie et l’Ukraine en font déjà partie, depuis le 16 mars 2022
la connexion et la synchronisation de ces deux pays avaient préparées en amont, depuis 2015 en gros, mais le passage s’est fait comme une mesure d’urgence après l’invasion par la Russie.
Pour les Etats baltes, les préparatifs ont été minutieux depuis 2018, pour un coût de 1,6 milliards EUR. La déconnection ne va pourtant pas de soi
les 3 pays ne sont désormais reliés au continent que par une seule interconnexion entre la Lituanie et la Pologne. Une seconde connexion est attendue pour 2030-31. D'ici là, tout dépend de la qualité de l'équipement, de la météo, et des attaques hybrides russes.
et on a vu qu’il y en avait beaucoup contre les câbles sous-marins au fond de la Baltique.
En tous les cas, c’est un signe de cette emprise énergétique russe sur le continent qui diminue
et on l’a aussi vu avec la fin du transit de gaz à travers l’Ukraine, depuis le 1er janvier 2025
qui a créé un manque à gagner pour la Russie d’au moins 6 milliards de dollars par an
sur cette question du transit par l’Ukraine, il y a plusieurs dimensions
les ajustements des consommateurs européens
les compensations par les importations de GNL
la question du pétrole
son transit par l’Ukraine, les destructions des infrastructures pétrolières russes et les sanctions occidentales
et évidemment la question de la Transnistrie, et je vais terminer par là.
L’arrêt du transit de gaz au 1er janvier, il a été mal vécu par la Hongrie mais surtout par la Slovaquie
le premier ministre Robert il est parti en guerre ouverte contre Volodymyr Zelensky,
parce qu’en plus de la question du gaz, le Slovaque accuse l’Ukrainien de fomenter un coup d’Etat pour le renverser, ce qui est assez fumeux
il a tenté de plaider sa cause à Moscou et à Bruxelles en menaçant des pires représailles
Mais en fait la Slovaquie n’a pas connu de pénuries de gaz, elle s’approvisionne sur les marchés européens et ça ne pose aucun problème,
sauf évidemment le problème politique entre Bratislava et Kyiv
Les Etats européens, ils se sont adaptés depuis 2022 et l’arrêt du transit de gaz par l’Ukraine il ne pose pas de problème
on voit que les prix du gaz sont restés stables sur les marchés européens, voire qu’ils ont baissé ces derniers mois
Notamment parce qu’ils ont diversifié leurs approvisionnements auprès d’autres pays
mais aussi qu’ils continuent à consommer du gaz russe,
à la fois par le gazoduc Turkstream à travers la Turquie
Mais aussi sous la forme de gaz naturel liquéfié
les terminaux européens de GNL ils tournent à plein régime depuis 2022,
La France étant l’un des principaux importateurs de gaz liquéfié russe
et l’année 2024 a marqué un record dans les importations,
l’Union européenne a importé près de 18 millions de tonnes de GNL russe, à peu près 20% de ses importations totales
Parce que Bruxelles a placé le gaz russe sous sanction et a interrompu ses livraisons de pétrole comme on va le voir
mais le GNL, il n’est pas sous sanctions
donc là dessus, la Russie continue d’avoir une emprise très forte sur l’europe
même si à 20% des importations, on reste loin de la dépendance au gaz russe qui était la norme en 2022
donc en termes absolus, la Russie a perdu de l’influence qu’elle n’a pas compensé par d’autres marchés, notamment chinois.
Et dès 2023, Gazprom, le géant d’Etat russe, est devenu une entreprise déficitaire.
Ca, c’est pour le gaz à travers cette question du transit par le territoire ukrainien
mais il faut voir que le pétrole, lui il continue à couler dans les oléoducs, notamment le Droujba sud.
En 2024, 11,5 millions de tonnes de pétrole russe sont passés par l’Ukraine
Kyiv y a gagné 250 millions de dollars en droit de transit
Mais la Russie y a gagné pas moins de 6 milliards
donc ça reste une rentrée conséquente.
Le volume de pétrole diminue d’année en année, donc ça fait moins de rentrées financières mais ça reste quelque chose.
Ce pétrole, il est à destination de la Hongrie, de la Slovaquie et de la République tchèque
seulement ces trois Etats car l’Union européenne a interdit l’importation du pétrole russe
elle a donné une exception à ces trois pays parce qu’ils sont enclavés, ils n’ont pas accès à la mer et c’était plus dur pour eux de trouver des alternatives
l’idée de cette exception c’était que Prague, Budapest et Bratislava trouvent des alternatives
Mais seule la République tchèque a fait cet effort, la Hongrie et la Slovaquie n’ont presque pas commencé à se diversifier.
Ce qui continue de faire des rentrées financières appréciables pour la Russie
et évidemment, ça ne dérange pas du tout Viktor Orban et Robert Fico de financer Vladimir Poutine
De son côté, Kyiv pourrait arrêter le transit de pétrole
Mais l’accord en vigueur court jusqu’en 2029
et Kyiv ne veut pas prendre le risque de se mettre en porte à faux vis-à-vis des Européens
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donc si je résume, on voit que globalement la Russie a perdu de son emprise sur les marchés énergétiques européens
encore une fois, ça ne veut pas dire que le secteur énergétique russe ne va pas survivre,
mais ça découple l’Europe des approvisionnements russes
et ça donne plus de marge de manoeuvre à Bruxelles pour résister à l’invasion de l’Ukraine
les Européens, de même que les Ukrainiens et les moldaves, ne dépendent plus de la Russie pour l’électricité
Pour le gaz, ça a énormément baissé à part pour le GNL
Ce qui met en lumière une grosse hypocrisie des européens
Et pour le pétrole c’est marginal, car l’influence russe est limitée à trois pays, potentiellement deux si la République tchèque diversifie vraiment ses importations.
Et le secteur pétrolier russe a encore récemment souffert des sanctions contre sa flotte fantôme
Il reste une dépendance européenne dans le domaine du nucléaire, mais c’est un secteur très particulier donc je n’entre pas là-dedans.
Un autre exemple qui montre la perte d’influence énergétique en Europe c’est le cas de la Transnistrie
Je ne reviens pas sur tous les détails de l’affaire, vous pouvez regarder ma dernière vidéo.
Mais demain, 10 février, c’est la fin de la période d’urgence pendant laquelle du gaz subventionné par les européens a été envoyé à Tiraspol pour éviter une crise humanitaire.
À partir de là la Transnitrie a deux options
Soit utiliser de l’argent européen pour acheter du gaz des marchés européens mais il y a des conditions à cette aide
Notamment sur le respect des droits de l’homme et l’élévation du prix du gaz aux tarifs moldaves
Et là dessus il faut mentionner que la commission européenne aide beaucoup Chisinau et Tiraspol, il y a une vraie solidarité européenne qui se met en place
Soit acheter soit même son gaz grâce a une aide russe, mais de toutes les manières ça se fera à partir des marchés européens
Visiblement il y a une compagnies hongroise qui va s’en charger
et Chisinaus s’assurera du respect des règles moldaves et européennes dans la négociation d’un contrat
Donc dans les deux cas, Moscou a perdu son influence directe sur la situation
Et il n’y a pas de scénario dans lequel elle puisse la rétablir
À moins que cette question du transit par l’Ukraine ne soit inclue dans un accord de cessez le feu, à voir.
En fait sur tous les plans, on constate cette tectonique des plaques qui a fait que depuis 2022 les europeens se sont peu à peu dégagés de l’emprise russe.
Ce n’est pas linéaire, il y a des hypocrisies et des exceptions, des contournements de sanctions et des dépendances qui restent
Et ce n’est pas forcément tout rose: les dépendance à la Russie ont été remplacées par d’autres, aux États-Unis, au Qatar, à l’Azerbaïdjan.
Et le fait que l’Europe importe moins d’hydrocarbures russes ça n’a quasiment pas aidé ses objectifs de lutte contre le réchauffement climatique
Mais cette rupture historique par rapport à une relation énergétique qui date des années 1970, elle est probablement là pour durer, il y a beaucoup de gens en Europe qui Toussaint Que ça reprenne mais même dans le cas d’un accord de cessez le feu,
Donald Trump toujours lui est très intéressé de vendre plus de gnlrt de pétrole aux européens, donc il ne soutiendra probablement pas une reprise de cette relation.
Voilà je m’arrête là, merci d’avoir regardé