La Transnistrie sans gaz

En Transnistrie, il n’y a plus de gaz, plus de chauffage, plus d’eau chaude et les coupures d’électricité peuvent s’étaler sur plus de 8 heures par jour

Depuis le 1er janvier, cette région de la Moldavie contrôlée par la Russie vit un scénario catastrophe

et potentiellement une crise humanitaire sans précédent.

Mais dans cette situation, il n’y a rien d’inévitable

puisque tout a été artificiellement élaboré par la Russie.

Bonjour à tous, c’est Sébastien, bienvenue dans cette nouvelle vidéo où l’on parle de cette crise qui est extrêmement grave pour la région

et qui montre que la Russie est loin d’avoir abandonné ses prétentions sur la Moldavie, en amont des élections législatives de juillet prochain.

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Alors, vous l’avez tous suivi, le 1er janvier, le transit de gaz russe à travers le territoire ukrainien s’est interrompu

un évènement historique en soi, qui met fin à une politique énergétique datant des années 1970

et qui a suscité beaucoup de déclarations hostiles de la Hongrie et de la Slovaquie

Mais ces gouvernements de Viktor Orban et de Robert Fico sont de toutes les manières hostiles à l’Ukraine et très Kremlin-compatibles,

donc il n’y avait rien de nouveau sous le soleil

si ce n’était pas cette question du transit du gaz, ils auraient trouvé une autre raison de critiquer l’Ukraine.

Pour l’Ukraine même, l’arrêt de ce transit de gaz représente un manque à gagner de 800 millions de dollars par an

mais à part ça ça n’a pas grand impact sur le pays qui ne consomme déjà plus de gaz russe depuis des années

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En revanche, c’est pour la Moldavie et la région sécessionniste de Transnistrie que la situation s’est compliquée.

La Moldavie avait pris des précautions pour constituer des réserves et diversifier ses approvisionnements

mais malgré cela le pays a instauré un état d’urgence et a mis en place des mesures d’économie

En gros l’hiver sera difficile pour les Moldaves mais ils s’en sortiront, aussi parce qu’ils sont assistés par ses voisins la Roumanie et l’Ukraine.

mais de l’autre côté du Dniestr, la situation est inédite

Donc j’y arrive, et je commence par rappeler que la Transnistrie est historiquement dépendante à 100% du gaz russe transitant par l’Ukraine

Grâce à un procédé ingénieux: Gazprom envoyait du gaz vers la Moldavie. en chemin, la Transnistrie pompait ce dont elle avait besoin

et comme la destination finale c’était la Moldavie, Gazprom envoyait la note à Chisinau.

L’Ukraine a mis fin à ce transit de gaz et donc la Transnistrie se retrouve sans rien.

Il faut s’imaginer cette coupure radicale: il y a environ 300.000-350.000 personnes qui vivent en Transnistrie

Et depuis le 1er janvier, tout est à l’arrêt

toutes les industries qui fonctionnaient au gaz

y compris la fabrique de pain

des dizaines de milliers de logements sont sans chauffage, et donc sans eau chaude

les habitants sont encouragés à refaire fonctionner des poêles à bois,

les coupures de courant s’étalent sur plus de 8 heures par jour et ça pourrait s’aggraver

la grande centrale thermique de Curciugan qui alimente en électricité les deux rives du Dniestr fonctionne pour l’instant parce qu’elle est passée au charbon

mais les réserves de charbon ne vont durer que jusqu’à la fin janvier.

ces problèmes affectent la Moldavie voisine mais à une bien moindre ampleur car les Moldaves ont des réserves de gaz

ont mis en place des systèmes alternatifs comme l’éolien, le solaire ou la biomasse

mais surtout importent de l’électricité et du gaz des pays voisins.

l’Ukraine livre de l’électricité en fonction de ses propres besoins et des bombardements sur ses infrastructures énergétiques.

Par contre, la Transnistrie refuse toute aide de l’extérieur,

que ce soit moldave, roumaine ou ukrainienne

le leader de la région, Vadim Krasnoselsky, est persuadé que la Russie va reprendre ses livraisons de gaz dans quelques jours

ce qui est impossible parce que d’une part l’Ukraine ne va pas réautoriser le transit

et d’autre part Gazprom refuse d’utiliser des routes alternatives, à savoir les gazoducs Turkstream et Transbalkanique

Si Gazprom utilisait cette route il faudrait au préalable régler le problème de la dette avec Chisinau dont j’ai déjà parlé.

donc Tiraspol préfère s’enfoncer dans la crise énergétique et humanitaire plutôt que d’accepter de l’aide

et ça, ça montre que cette crise est artificielle et qu’elle sert les intérêts du Kremlin.

Et pourquoi ça? Parce que la Moldavie qui est une république parlementaire va avoir des élections législatives en juillet prochain

On a vu les dernières élections, présidentielles et un référendum: les Russes et pro-russes avaient mis en place des opérations de désinformation massives

ils ont échoué sur ces élections, mais ils veulent retenter leur coup avec les législatives

et donc le Kremlin essaie de rejeter toute la faute de cette crise sur Chisinau, qui est accusé d’organiser un blocus énergétique de la Transnistrie.

l’idée, et ça a été pratiqué par le passé, c’est que la Russie fabrique cette crise, et que des forces russophiles en Moldavie qui sont aujourd’hui dans l’opposition

fassent campagne en disant que la solution se trouve dans un accord avec la Russie

donc la Russie fabrique la crise et ensuite se présente comme le seul acteur qui peut la régler

ça a déjà été testé par le passé et ça marche, surtout avec une population moldave, transnistrienne et gagouze qui est pétrie de nostalgie pour l’URSS

de sentiments pro-russes, anti-roumains et eurosceptiques.

Donc je résume, là on a une grave crise en Transnistrie

avec des centaines de milliers de gens qui sont dans le noir et dans le froid

à cause d’une crise fabriquée et entretenue par la Russie qui contrôle la Transnistrie.

Il y a des possibilités de régler la crise maintenant, en aidant Tiraspol depuis la Moldavie, la Roumanie et l’Ukraine.

Mais Tiraspol et Moscou refusent en accusant Chisinau d’avoir créé cette crise

et en faisant le pari que les électeurs vont désavouer Maia Sandu dans les urnes en juillet

si ça continue comme ça, la machine de propagande et de désinformation est bien huilée et ça peut marcher.

Mais entre maintenant et juillet il peut se passer beaucoup de choses

la Moldavie, l’Ukraine et leurs partenaires européens peuvent trouver des manières d’intervenir économiquement ou politiquement

Pas militairement, ça c’est un fantasme

et si Chisinau, Kyiv, Bucarest et Bruxelles trouvent le moyen de désarmer cette crise, alors ça sera le dernier hiver

pendant lequel le Kremlin peut utiliser cette arme énergétique

et cela facilitera la réintégration de la Transnistrie au sein de la Moldavie.

donc ce qui se passe en Transnistrie est primordial

ça peut soit faire basculer la Moldavie entière dans le giron pro-russe lors des élections de juillet

soit ça peut accélérer la fin de cette petite langue de terre qui est un territoire contrôlé par la Russie, non-reconnu internationalement, au coeur de tous les trafics de contrebandes et de trafics en tout genre depuis 1992

on va continuer à suivre ça sur cette chaîne,

merci d’avoir regardé jusqu’au bout

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