LLB: "Ce qui se passe sur le front de Bakhmout est invraisemblable"

Article publié dans la Libre Belgique, le 12/12/2022

Malgré une pause due à la boue automnale, rien ne présage une trêve hivernale.

Le “général hiver” a-t-il gelé les opérations militaires en Ukraine et contraint les belligérants à patienter jusqu’au printemps? Depuis le libération de la ville ukrainienne de Kherson, le 11 novembre, les cartes d’état-major n’évoluent plus guère. “La boue de l’automne a compliqué les opérations de part et d’autre”, révèle Xavier Tytelman, ancien navigateur aérien de la marine française et expert militaire. Pourtant, “les combats restent extrêmement intenses sur le terrain. Rien ne laisse penser que les affrontements vont s’interrompre cet hiver.”

Xavier Tytelman observe avec intérêt le front nord-est, autour de Svatove. Là, les Ukrainiens poussent avec constance afin de libérer la région de Louhansk. Au sud, dans la région de Zaporijia, on observe “de plus en plus de frappes ukrainiennes dans la profondeur”, qui pourraient présager de la préparation d’une offensive prochaine. Sur ces deux fronts, l’expert attend d’éventuels mouvements d’envergure “une fois que les sols seront gelés”. Les travaux de fortifications russes, en arrière de ces deux fronts, démontrent leur appréhension d’une nouvelle attaque.

Au sud-est, le fleuve Dnipro qui avait handicapé la défense russe sur la rive droite est désormais un obstacle infranchissable pour les Ukrainiens, permettant aux Russes de bombarder les territoires libérés. Dans la ville de Kherson, deux personnes ont encore perdu la vie ce lundi. “Cela dit, on observe un harcèlement constant des positions russes par les Ukrainiens”, précise Xavier Tytelman.

C’est sur le front est de Bakhmout que les Russes sont à l’offensive. “Ce qui se passe là-bas est invraisemblable: on assiste à des opérations suicides russes qui ne débouchent sur rien d’autre que de lourdes pertes au quotidien.” Un acharnement justifié par la nécessité pour Vladimir Poutine et Yevgueni Prigojine, patron de la société de mercenaires Wagner, d’afficher un résultat.

“Les derniers succès russes datent de la fin juin”, insiste le général français Nicolas Richoux. “Mais l’acharnement sur Bakhmout se base sur des conscrits mal encadrés et mal formés, lancés face à une résistance ukrainienne épique”. De fait, la ville, bien que “totalement détruite” selon Volodymyr Zelensky, n’est pas encerclée. “Si elle en venait à tomber, Bakhmout pourrait bien être une nouvelle victoire à la Pyrrhus des Russes”.

Pour compenser son impuissance sur le terrain, le haut commandement russe poursuit sa stratégie de bombardements en profondeur des infrastructures civiles et énergétiques du pays, dans une logique de terreur et d’attrition. Malgré la rapidité des services publics ukrainiens à produire des réparations rapides, “chaque centrale électrique est endommagée”, assure le gouvernement. Plus d’un million d’habitants d’Odessa ont été plongés dans le noir à partir de samedi, l’opérateur local se révélant incapable de réparer les dégâts.

Des situations critiques qui ne semblent pas remettre en cause la détermination de la population face à l’agression du Kremlin. Si celui-ci multiplie les signaux concernant la relance des négociations, Volodymyr Zelensky se contente d’appeler la Russie à "retirer ses troupes d'Ukraine" avant Noël pour "assurer une cessation durable des hostilités”. Le président se projette déjà sur l’après-guerre: en visioconférence avec les dirigeants du G7, ce lundi, il a proposé de convoque “un sommet spécial - le sommet sur la paix mondiale - pour décider comment et quand nous pouvons mettre en oeuvre les points de la formule de paix ukrainienne", a annoncé M. Zelensky dans un discours en visioconférence, appelant

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