RFI: A l’aide des femmes enceintes du Donbass

Reportage diffusé dans l’émission Accents d’Europe, sur RFI, le 13/11/2018

La guerre du Donbass se poursuit dans l’est de l’Ukraine, et continue d’affecter les populations civiles. Plus de 5 millions de personnes vivent de part et d’autre de la ligne de front dans des conditions précaires. Beaucoup souffrent de problèmes de santé et de malnutrition. Les femmes enceintes et les enfants en bas âge sont particulièrement vulnérables. Une association humanitaire française tente de leur venir en aide d’une manière simple: en distribuant des vitamines et des compléments alimentaires 
A Rubijne, dans l’est de l’Ukraine, Sébastien Gobert



Une à une, les patientes entrent dans la salle de consultation à l’hôpital de Rubijné et prennent place pour attendre leur tour. Comme toutes les autres patientes, la jeune Marina Kislova est à un stade de grossesse avancé et elle souffre d’anémie.



Marina Kislova: 
J’ai commencé la semaine dernière. C’est un traitement sur 100 semaines de vitamines et de complément aliementaire . Ca va m’aider durant ma  grossesse. 


Plus de 
20 000 femmes enceintes des régions de Donetsk et Louhansk,  et 195.000 d’enfants âgés de 6 mois à 5 ans sont ciblés par ce programme humanitaire. Selon des statistiques  officielles entre 40% et 60% des femmes enceintes de la région sont victimes d’anémie. 38% des enfants ont une faible immunité.

Ici, à l’hôpital de Rubijné, c’est la doctoresse Nataliya Netcheportchouk qui coordonne la distribution.



Nataliya Netcheportchouk: 
Nous nous basons sur les besoins des patientes. La grossesse peut provoquer des complications extra-génitales, des carences en fer, en iode, en vitamines D, pour certaines femmes il faut compenser ces carences avec un dosage supplémentaire de 30%.

L’Ukraine est connue comme un grand pays agricole. Pourtant, les problèmes de malnutrition sont courants dans cette zone de conflit. Les populations civiles et les centaines de milliers de personnes déplacées doivent se contenter de quelques légumes, de gruau, de  viande de mauvaise qualité et de poisson de rivière. Nataliya Netcheportchouk.

Nataliya Netcheportchouk: On a plus accès dans la région aux produits de base d’une alimentation saine. Pour éviter les carences en fer, il faut de la viande. En particulier du porc, du veau. Les habitants de Rubijne n’ont pas accès à cela chaque jour. Parce qu’il n’y a pas d’offre, mais aussi parce qu’ils ne peuvent se le permettre.


En réponse, l’Association Internationale de Coopération Médicale (AICM) a lancé ce programme de  compléments alimentaires qui  va s’étaler sur 3 ans. Le Français Christian Carrer est le président de l’AICM, installé en Ukraine depuis plus de dix ans. Il explique que cette initiative simple peut résoudre de très graves problèmes de santé pour les mères comme pour les nourrissons
.

Christian Carrer: Il faut vraiment beaucoup de courage pour faire un bébé dans ces conditions. Mais il y a quand même 26000 nouveaux-nés dans les territoires de l’est de l’Ukraine contrôlés et non-contrôlés par l’armée ukrainienne. Les futurs mamans qui n’ont pas accès à un bon suivi médical et à une nourriture saine font souvent face à des grosses pathologiques, des fausses couches, une forte mortalité infantile, et les enfants ont des pathologies congénitales en forte augmentation au niveau de la vision, de l’audition, du coeur, et des voies pulmonaires. Pour les quantifier, il faudrait des statistiques fiables. Mais la propagande des deux opposants au conflit tente de minimiser ces problèmes. 



En 2016, un projet pilote  similaire dans la ville de Gorlovka, en république auto-proclamée de Donetsk a permis de diminuer de 70 à 80 pour cent le taux de naissances prématurées. Avec un budget d’environ 150 000 euros, soit 5% de son budget total, l’association améliore durablement la situation sanitaire à moindre cout. Et ce succès tient au fait que les patientes s’approprient le traitement. Christian Carrer

.

Christian Carrer: 
Les femmes ukrainiennes et slaves en général ont une résistance à tout ce qui est artificiel. Cela se voit par exemple dans le domaine des vaccins. Seulement de 20 à 30% des enfants sont vaccinés à cause des vaccins frelatés distribués dans les années 90. Dans le domaine des vitamines, on reste dans le naturel. Ces complexes de fer, de sélenium, de minéraux et de vitamines sont connus, disponibles en pharmacie, et déjà prescrits par les médecins. Par contre, ils sont trop coûteux.

A Rubijné, la doctoresse Nataliya Netcheportchouk confirme.

Nataliya Netcheportchouk: 
Si vous prenez cette boîte de vitamines. Il y a environ 30 pilules à l’intérieur. Ca coûte l’équivalent de 20-25 euros. Le salaire moyen ici, c’est l’équivalent de 80-90 euros. Ces vitamines coûtent le tiers d’un salaire. 


Une des forces majeures du projet est l’implication du personnel soignant, par des formations et des opérations de sensibilisation  sur l’importance des vitamines. Selon la plupart des ONG présentes sur place, l’accès à l’information, si ce n’est aux traitements adéquats, reste difficile dans la région. De nombreuses jeunes mères négligent leur alimentation et arrêtent l’allaitement trop tôt. Elles sont  mal conseillées par leurs médecins traitants.

Dans le cabinet de Nataliya Netcheportchouk, Lisa Goura est en consultation. Elle voudrait un second enfant, et se renseigne auprès de son médecin traitant.



Lisa Goura: 
Nataliya m’a recommandé de prendre ces vitamines. J’ai commencé, et la composition me convient tout à fait. J’ai l’impression que je me sens mieux, je dors mieux, et je me sens plus en forme.

Un retour positif de la part des patientes qui pourrait aider l’association à étendre le projet à l’ensemble de l’Ukraine.

Ecouter le reportage ici

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