Une légion ukrainienne en Pologne
Varsovie et Kyiv créent une légion ukrainienne composée d’Ukrainiens résidant en Pologne. Ils y seront formés avant d’être envoyés sur les fronts ukrainiens et ils auront la possibilité, après leur service, de traverser la frontière pour rentrer chez eux, en Pologne.
Est-ce que c’est LA solution pour combler les difficultés du recrutement militaire en Ukraine?
Bonjour, c’est Sébastien, bienvenue dans cette vidéo où l’on va parler d’une initiative originale, la légion ukrainienne de Pologne.
Ce projet a été lancé début juillet par Volodymyr Zelensky et Donald Tusk, le premier ministre polonais.
Elle vise à recruter des Ukrainiens résidant en Pologne pour former des unités militaires destinées aux combats en Ukraine.
Les formations seront dispensées par les Polonais. On parle d’entraînements de 4-5 mois.
Surtout, les soldats envoyés depuis la Pologne sur les fronts ukrainiens auront la possibilité de re-franchir la frontière lors de permissions ou à la fin de leur contrat, ce qui est interdit pour tout citoyen ukrainien âgé de 18 à 60 ans.
Un mois après l’annonce, on a peu de détails sur la mise en application de ce projet, mais des bruits circulent sur plusieurs centaines ou milliers d’Ukrainiens qui auraient exprimé leur intérêt pour cette initiative.
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En soi, l’idée est très pertinente. Avant 2022, on avait environ 1 million d’Ukrainiens qui habitaient en Pologne pour des motifs économiques.
Après 2022, ce chiffre a doublé, voire triplé.
Parmi les citoyens ukrainiens en Pologne, on doit avoir plusieurs centaines de milliers d’hommes en âge de combattre.
Soit qu’ils s’y trouvaient avant 2022, soit qu’ils ont fui le pays depuis.
On estime qu’au moins 300.000 Ukrainiens ont illégalement franchi la frontière pour échapper à la conscription. Pas tous résident en Pologne mais un certain nombre.
Ces deux dernières années, les autorités ukrainiennes ont tenté de les ramener au pays afin de les enrôler dans les forces armées.
C’est très compliqué. Les conventions internationales protègent ces citoyens, à juste titre. Et avoir une police polonaise, tchèque, estonienne ou française qui ferait la chasse aux Ukrainiens exilés pour les renvoyer en Ukraine sans un motif criminel, c’est peu défendable.
Avec cette légion, les autorités ukrainiennes tentent une autre approche, sur une base volontaire.
Avec la promesse de formations suffisamment longues, menées par un pays de l’Otan.
Ce qui est attrayant pour un certain nombres de personnes qui se méfient des carences de l’armée ukrainienne. Les entraînements ne sont pas suffisamment longs. Et Volodymyr Zelensky a admis lui-même que son armée n’a pas assez de capacités d’accueil et de formations pour les nouvelles recrues.
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Mais dans le flou qui règne autour du lancement de cette légion ukrainienne, il y a toute une série de défis.
D’abord, le financement, qui n’a pas été précisé.
Ensuite, l’équipement. Si ces hommes sont formés avec des armes et du matériel de l’Otan, peuvent-ils l’emporter sur le front? Ou vont-ils changer se retrouver sur le terrain avec un équipement différent de celui de leur base d’entraînement?
Est-ce que les formations polonaises seront appropriées? C’est une vraie question, car on sait par exemple qu’une série de formations dispensées par l’Otan ne prend pas en compte les drones, qui sont une composante incontournable des combats en Ukraine.
Les Ukrainiens, contraints et forcés, sont à la pointe de l’art de la guerre. On est beaucoup à dire que les formations de l’Otan sont utiles, mais qu’à la fin des fins, ce seront les Ukrainiens qui formeront les troupes de l’Otan aux conflits du 21ème siècle.
Il y a aussi la question du rapport avec les autres troupes. L’immense majorité des soldats mobilisés sur le front depuis 2022 ne peuvent pas être démobilisés et ne peuvent pas quitter le pays.
Quand les soldats de la légion ukrainienne rencontreront des troupes régulières ukrainiennes et parleront de leurs permissions à l’étranger et de la fin de leur contrat, cela ne va-t-il pas creuser la fracture au sein de la population?
Cette problématique de la mobilisation, elle est cruciale pour l’Etat ukrainien dans son effort de guerre, mais elle est aussi dévastatrice pour la cohésion nationale.
Entre ceux qui se battent, ceux qui se cachent, ceux qui ont fui, et maintenant ceux qui pourraient bénéficier d’un contrat aux conditions préférentielles…
Cela engendre des ressentiments, des tensions, mais aussi de la corruption et des situations de précarité avec lesquelles le pays va devoir vivre pendant des années.
Et puis pour revenir à l’effort de guerre. Même si c’est tard, la légion ukrainienne est un projet bienvenu qui montre que l’Ukraine continue à chercher des moyens de lutter contre cette invasion existentielle…
Si ça marche en Pologne, ça peut marcher dans d’autres pays.