RFI: A Kiev, “Une Démocratie de l’Aire de Jeu”

Reportage diffusé dans l'émission "Vous m'en direz des Nouvelles", sur RFI, le 30/06/2016. (Début du reportage à 42'30)Qui sont les Ukrainiens? Ce peuple d’Europe de l’est, des anciens Soviétiques, qui ont fasciné le monde avec leur Révolution en 2013-14, et la guerre qui s’est ensuivie. Les Ukrainiens intriguent; les Ukrainiens inquiètent, mais qui sont-ils? Habitant à Kiev, un photographe français a choisi de montrer leur vrai visage, tel qu’il le voit au quotidien. Et pour les présenter, il a choisi les aires de jeu de Kiev. Des endroits chargés d’une dimension émotionnelle et ludique, sur lesquels les individus affichent leurs personnalités. Son travail sur les aires de jeu, les Maïdantchik en ukrainien, fait beaucoup de bruit en Ukraine. Sébastien Gobert nous le présente. 
Ils sont là, au milieu de toboggans, de balançoires et de tourniquets. Des jeunes sportifs et des femmes âgées, des vétérans de la Seconde Guerre Mondiale et des militants de la Révolution du Maïdan, des mères de famille et  des adolescents. Ils sont tous différents. Mais dans l’objectif de Francis Mazuet, ce sont avant des Ukrainiens, tous sur un pied d’égalité, debout sur des aires de jeu.Francis Mazuet: Mon projet s’appelle “Maïdantchik, une démocratie de l’aire de jeu”Francis Mazuet est enseignant à Kiev depuis 2007. Il a été très vite fasciné par les “maïdantchik”, les aires de jeu, en ukrainien, pour beaucoup datant encore de l’époque soviétique.Francis Mazuet: ça, c’est quelque chose qui est lié au pays. C’est-à-dire que j’ai vraiment trouvé une esthétique particulière, un charme particulier à ces terrains de jeu. Il y a une fantaisie, une diversité extraordinaire dans ces terrains de jeu. Donc je demande à des personnes de se tenir au centre de cette aire de jeu, et droites, si possible, tout en laissant une certaine latitude. Et la personne doit s’intégrer à ce lieu tout en marquant une distance avec ce lieu. C’est tout l’enjeu, à chaque fois, pour moi. En 2013, comme toute la ville de Kiev, Francis Mazuet est happé par la Révolution du Maïdan. Et là, ça lui saute aux yeux: de Maïdan aux Maïdantchik, il n’y a qu’un pas.Francis Mazuet: C’est-à-dire que ce nom de Maïdan, peu à peu il s’installe comme un terme exotique mais qui devient peu à peu familier à des oreilles complètement étrangères à la langue ukrainienne. Et avec ce petit “Tchik” là, qui est un diminutif, “Maïdantchik”, ça prend une résonance, dans ma tête, extraordinaire.Une fois que le tumulte de la Révolution s’apaise, Francis Mazuet reprend vite possession des Maïdantchik, en intégrant dans son projet l’idée d’une Révolution en faveur de la démocratie.Francis Mazuet: Pour moi il est devenu de plus en plus clair et nécessaire que ce projet représente l’Ukraine et les vrais visages des Ukrainiens. Au-delà de la propagande et des idées fausses et faciles que l’on peut plaquer sur ce pays. Pour moi, c’est représenter vraiment des gens. Et pour ce faire, rien de plus démocratique qu’une aire de jeu, après tout. D’autant que les maïdantchik revêtent une dimension toute particulière pour de nombreux Ukrainiens.IMG_4839Francis Mazuet: Il y a une dimension émotionnelle parfois très forte avec l’aire de jeu, c’est-à-dire que certains de mes modèles tiennent à m’emmener sur le lieu où ils ont joué enfants. L’aire de jeu, ça dédramatise aussi un p’tit peu “démocratie”, ce que ça peut avoir de sérieux. Pour moi, l’élément ludique est important.Dès sa présentation, le travail de Francis Mazuet est très apprécié en Ukraine. A force de vouloir montrer les Ukrainiens, il en amènerait certains à se regarder eux-mêmes. Du moins c’est ce que pense Pavel Schur, un jeune artiste kiévien.Pavel Schur: Une des choses qui me fascine avec le travail de Francis, c’est son honnêteté. Il fait exactement ce qu’il aime faire, et il montre ce qu’il voit. Et c’est très important car nous, Ukrainiens, nous ne savons pas apprécier la beauté de villes. Nous avons un complexe d’infériorité par rapport à cela, par rapport aux villes européennes. Et Francis nous montre cette beauté insoupçonnée, que l’on trouve juste en bas de chez nous. Il nous la montre comme si elle était naturelle, et non comme si on devait en avoir honte.L’artiste n’en est qu’à ses débuts, et travaille à d’autres projets centrés sur des lieux de vie iconiques des Ukrainiens. Mais déjà, les photos de Francis Mazuet et leurs histoires individuelles racontent une grande histoire, celle de l’Ukraine, et du peuple des Maidantchik.Ecouter le reportage ici (A partir de 42'30)
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