Edito LLB: Bien sûr, la Russie va nier

Edito publié dans La Libre Belgique, le 24/04/2022

Qui peut se rappeler la dernière fois qu’un représentant officiel de la Fédération de Russie a admis publiquement que son armée ou ses forces spéciales se sont livrées à un bombardement sur des civils ? À des pratiques de torture ? Ou même à une bavure quelconque ? On peut chercher longtemps. En Tchétchénie, dans le théâtre de Moscou, dans l’école de Beslan, en Géorgie, en Ukraine, en Syrie et ailleurs, la version officielle est que les militaires russes ont trente ans d’exemplarité derrière eux. Pas un pas de travers. Pas un. Les morts ne sont que les résultats "d’opérations spéciales", de "missions anti- terroristes" ou de cas de légitime défense.

Un bilan de blanche colombe qui tranche pour le moins avec la réalité établie par les témoignages de victimes, les rapports indépendants, les enquêtes de journalistes. Chacune de ces voix discordantes s'est heurtée au mur du déni, constant et implacable, du Kremlin. Celui-ci s'accompagne ces dernières années de la création d'un contre-narratif visant à rejeter la responsabilité sur d'autres. L'intox pour attribuer l'attaque, en 2014, contre le Boeing MH17 à un prétendu avion de chasse ukrainien en est un exemple criant. Boutcha pourrait bien s'ajouter à la liste.

Certes, l'horreur qu'on y a découverte exige des investigations indépendantes avant d'en imputer la responsabilité à quiconque. Ce récexe sain de présomption d'innocence est l'une des vertus de nos États de droit. Mais déjà, les premières observations sur le terrain, les premiers témoignages de survivants ou encore les prises d'images satellitaires s'amoncellent comme autant de preuves contre l'armée russe, puissance occupante. Au-delà de Boutcha, la centaine de corps éparpillés à travers les zones libérées présagent des pires exactions. De même que les bombardements sur des zones résidentielles ou les attaques sur les véhicules fuyant le long de "corridors humanitaires". Le simple fait d'avoir lancé cette guerre injustigée peut être considéré comme un crime. Mais attendons que la poussière retombe, dans l'espoir peut-être naïf qu'une justice internationale fasse la lumière sur ces atrocités et punisse les coupables.

Dans l'immédiat, face à l'émergence de narratifs concurrents pour expliquer la monstruosité de Boutcha, on peut évidemment se demander si les Ukrainiens ont exagéré ou mis en scène les faits. C'est un récexe sain. Mais dans l'attente de clarigcations, posons-nous une question : à quand remonte la dernière fois que la Russie a dit la vérité sur ses actions et exactions militaires ?

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